27 février 2011

Trouvé, perdu, reçu, retourné (2)

Une jeune maman accompagnée de jumeaux d'environ 8 ans  rapporte un livre abîmé par les enfants et demande en sortant son porte-monnaie le montant qu'elle devra débourser. Très désolée, elle dit en baissant les yeux que le livre a vraisemblablement coulé dans la piscine !! Elle sort alors d'un grand sac blanc un livre encore mouillé, tout gondolé, irrécupérable.  J'éclate de rire, ça devient vite communicatif.

C'est le grand livre de Ken Marschall intitulé : Inside the Titanic : a Giant Cut-Away Book.  26,95  $ 

---------------------------------------------------
Reçu à la bibliothèque par la poste comme à chaque année et adressé ainsi :
A l'attention des parents de Saul Bellow
C'est le : Le magazine des camps de vacances certifiés du Québec = The magazine of certified residential camps in Quebec .

Réponse :
27 février 2011.
A qui de droit,
Nous désirons vous faire savoir que Saul ne fréquente plus les camps d'été, inutile de nous envoyer le magazine. Merci
-------------------------------------------------------------------------------------------------

24 février 2011

Trouvé, perdu, reçu (1)

Après la fermeture, Diane procède toujours à une dernière ronde, replace un livre, ramasse un  journal, jette un papier à la poubelle, repousse une chaise et quelquefois trouve un objet oublié par un usager.  En avril,  Diane  a trouvé sous un fauteuil, une canne blanche pliée en 3 !!! 

- Mais quel espèce d'étourdi oublie sa canne blanche à la bibliothèque ?
- Sans doute quelqu'un accompagné.
- Non c'est quelqu'un qui l'a déposé et qui n'arrivait plus à la retrouver.
- Pensez-y, un miracle a peut être eu lieu ici-même ce soir, le miraculé nous aura laissé sa canne devenue inutile.

Il est tard, on rigole, on  se dit que le distrait reviendra sans doute demain à la première heure ou téléphonera. Diane attentionnée prend la canne blanche et la place bien en vue à l'accueil... Personne n'ose rien dire. Nous sommes en août, la canne y est toujours. 

--------------------------------------------------------------------------------------------------
Trouvé dans le livre  : Ayez le courage de changer votre vie, une enveloppe adressée, timbrée et non cachetée... à l'intérieur une lettre de rupture très touchante et jamais envoyée... On fait quoi là ?

---------------------------------------------------------------------------------------------------

Le jeune Étienne, solitaire, timide, frêle et pâlot fut un régulier à la biblio de juin à septembre. Il arrivait tous les jours à vélo vers 14h,  s'installait dans un fauteuil, feuilletait des BDs puis allait à la toilette, où il restait parfois longtemps, même qu'un jour  Daniel est allé cogner et lui a demandé si tout allait bien, on le croyait malade.  En novembre, au moment des travaux de rénovation, un ouvrier a trouvé dans le plafond suspendu de la toilette le livre: Le sexe pour les nuls,  en bien mauvais état, un livre que l'on ne trouvait plus depuis la fin juin.

----------------------------------------------------------------------------------------------------

16 février 2011

L'odeur de la censure

En 1992, alors jeune bibliothécaire, responsable de la section jeunesse, j'étais loin des enjeux, des débats sur la censure et la liberté de lire.
J'étais insouciante, peu encline à me définir comme responsable et défenseure de la liberté de lire. Jusqu'au jour où un élu demanda officiellement que l'on retire un livre jeunesse de la collection.



J'ai refusé catégoriquement, je suis restée inébranlable. L'élu, appuyé par un groupe de parents a voulu former un comité (advisory comitee) composé de parents dont le mandat aurait été d'approuver les choix de documents pour les jeunes enfants, de proposer le retrait de certains documents et de faire des mises en garde sur les documents qu'ils auraient jugés trop violents.


C'était l'époque où des mamans se regroupaient et militaient contre la violence présente dans les médias, contre les mangas, etc. Cet élu s'est rapidement fait rabrouer par ses collègues et dû laisser tomber sa plainte et son idée de comité, mais pendant quelques semaines, une odeur aigre flotta autour de nous à la bibliothèque.


On se disait à la blague entre nous : Tient, ça sent sûre.


J'ai eu à défendre mon choix, mes choix, ma position, dans mon propre milieu mais aussi auprès de journalistes de la presse écrite et télévisuelle. C'était bien avant le support que peuvent apporter les réseaux sociaux, les ressources sur le Web étaient alors presqu'inexistantes. Prise au dépourvue, isolée, pas très appuyée, mais forte de la certitude de ce que j'avais à faire, à défendre, je m'en suis bien tirée et je me suis jurée que jamais plus on m'y reprendrait.

En cette semaine de la liberté de lire, j'ai décidé d'en parler et surtout de partager ces petits conseils. Dans les semaines qui ont suivies, j'ai travaillé à
Quand il est question de liberté de lire, énoncez clairement votre position, adoptez celles des grandes associations (ce sont vos alliés), participez aux débats entourant la censure, restez toujours à l'affût des odeurs sournoises de censure.


Voici le livre dans lequel le plaignant voyait une démonstration explicite de violence familiale !!



The bear and the fly a story by Paula Winter, un album sans texte, en noir et blanc, publié en 1976.

Et toujours disponible à la bibliothèque ; )

13 février 2011

Petit Barbu, pas d'adresse, pas de carte

Ils arrivent en novembre, en même temps que le temps froid et humide, les jours gris et moches. Ils nous fréquentent quelques semaines puis disparaissent.

On les reconnait tout de suite, par l'allure, le regard vide, les gros sacs qu'ils traînent avec eux. Ils entrent, se font petits, regardent par terre, se dirigent vers une place un peu retirée. Chacun fait sa petite affaire, celui-ci feuillette une BD, celui-là une revue, cet autre médite en marmonnant, certains font discrètement l'inventaire de leurs possessions, les plus "poqués" ont des tics, surveillent les autres.

Ces nomades urbains me fascinent, m'intriguent, j'aimerais connaître leurs trucs, leur emploi du temps, leur destination, mettre la main sur leur carnet de "bonnes adresses". Ils arrivent à survivre avec presque rien du tout, profitent de ce qu'on leur offre, explorent nos poubelles, utilisent nos toilettes, se réchauffent une heure ou deux, puis repartent.

Des clients s'offusquent, demandent qu'on les mettent à la porte, ils dérangent par leur allure, parfois par l'odeur mais surtout par ce qu'ils représentent.

Il est 9 h 25, il fait - 14° dehors, une odeur très peu subtile de friture et de patates frites réchauffées provenant de la grande salle d'étude s'infiltre jusqu'à mon bureau. Je pars investiguer ... je ne vois que 5 personnes ce matin, les accrocs du WEB ont bravé le froid afin d'assouvir leur besoin de naviguer. Mais d'où vient l'odeur de friture.

Daniel me fait signe de le rejoindre au comptoir, il m'explique que le Petit Barbu attendait l'ouverture ce matin, après être allé aux toilettes, il s'est installé tout au fond avec une BD. Il semblait juste heureux d'être au chaud, il ne dérangeait pas. Daniel a senti l'odeur de frites bien avant moi, s'est dirigé vers le Petit Barbu. Il y avait à coté de lui un sac de chez MIKE's, il avait réchauffé ses frites en les étalant bien sur le calorifère chaud et se régalait.

C'est connu dans le milieu de l'itinérance, les bibliothèques font partie des "bonnes adresses" accessibles à tous, ouvertes 7 jours/7.

photo : Lulian Nistea
http://www.cibl1015.com/actualite/-/pub/6Usm/content/570415-moins-d-aide-pour-les-femmes-itinerantes?redirect=%2Factualite

12 février 2011

Madame Cholette no. 003773652

Madame Cholette (nom fictif) demande à me voir. Je connais la dame depuis des années, je décide de la rencontrer au comptoir de prêts plutôt que dans mon bureau... mon temps est précieux aujourd'hui.

Tout le monde sait que Madame Cholette a perdu sa soeur jumelle quand elle était petite et ne s'en est jamais vraiment remis. Sa soeur, devenue un ange, lui enverrait des signes, des conseils et des messages régulièrement.

J'arrive au comptoir, Denise roule les yeux à l'envers en me laissant sa place. Je salue Madame Cholette qui me demande en me présentant un livre Écouter les messages de vos anges. ou un titre du même genre :

- Ce livre est dû pour aujourd'hui, mais je veux le garder, c'est important. Est ce que je peux acheter ce livre, c'est important pour moi ?

Je lui griffonne sur un bout de papier le nom et l'adresse de la librairie la plus proche, et lui indique le prix que nous avons payé pour ce livre l'an dernier. J'étire le bras pour prendre le document afin d'effectuer son retour, Madame Cholette ne le lâche pas et s'avance au dessus du comptoir pour me chuchoter.

- Mais vous ne me comprenez pas, c'est CE livre que je veux. Pas un autre avec le même titre. Ma soeur me parle par ce livre.

(Entendez-vous comme moi ici la petite musique de Twilight Zone... tidididi tidididi)

- Je suis désolée Madame Cholette, ce livre appartient à la bibliothèque, il m'est impossible de vous le vendre, mais vous pouvez le reprendre un autre 3 semaines si vous le désirez ?

- Et qu'arriverait-il si je ne le rapportais pas ?

- Et bien on vous facturerait le livre, les frais de retard et les frais d'administration mais je ne le conseille pas, vous devez rapporter les livres qu'on vous prête. Vous avez toujours l'option de l'acheter à la librairie.

Je lui refais un prêt de 3 semaines, lui souhaite une belle journée et juste avant de retourner dans mon bureau, j'entrevois Madame Cholette qui caresse le livre et le remet délicatement et avec tendresse dans son sac de velours bleu en marmonnant et hochant la tête.

Environ une heure plus tard, Denise entre dans mon bureau avec un petit sourire en coin.

-Madame Cholette vient de téléphoner, elle a malencontreusement renversé son café sur un livre emprunté à la bibliothèque et demande qu'on lui facture. Elle s'excuse sincèrement.

Un ange passe...

Je ne peux m'arrêter

Un an déja sans écrire sur ce blog, je devrais m'en servir comme journal, pour faire le point.

J'aurai 55 ans cette année... Le temps file, vitesse grand V. Ma grand-mère me le disait souvent : "Plus tu vieillis ma Minoune, plus ça passe vite. Si t'as des choses à faire, fais-les tut suite, attends pas. Tu' l sais pas, t'auras peut-être pas de nouvelle chance."

Je n'écoutais pas trop ma grand-mère, je croyais le temps élastique, je me croyais en contrôle du temps. J'aurai 55 ans cette année... Les projets sont encore nombreux au travail, la plus jeune demande encore beaucoup de mon temps, mes parents se portent bien mais aiment qu'on les visite régulièrement.

On dirait bien que j'ai maintenant conscience du temps qu'il me reste (20, 30, espérons que ce soit 40 ans) alors je m'en rajoute, les semaines sont remplies au MAX et je pense qu'il est maintenant temps de piger dans la fameuse "bucket list".

J'aime les listes, j'en fais 2 chaque matin depuis des années. Ce qu'il faut faire aujourd'hui et ce qu'il faut acheter à l'épicerie.

Voici ce qui est déjà établi

Cours d' espagnol les mardis ... mais trouver l'endroit et le temps pour apprendre l'italien, j'oublie le bulgare et le montagnais pour l'instant

Les 2 voyages annuels à Varadero, Cuba pour la mer, le soleil, le sourire des amis Cubains, pour Pierre et avec Pierre.


Se garder informé et lire le soir, lire le matin très tôt, lire le week-end, lire en voyage, lire surtout toute La Presse du samedi, écouter de la musique, des films, des séries télé, des bons spectacles, voir de la danse.

Boire du vin, rire et procrastiner les vendredis soirs à la maison ou au chalet

Mise en forme : Classe de yoga les lundis, parfois aussi le dimanche à la ferme , marche rapide , nager (préférablement dans la mer)

Diner chez François avec les amies tous les mardis : C''EST SACRÉ pour Liz, Josée, Claude et moi

Rénovations extérieure et intérieure de la maison : ALMOST ALL DONE...passons au chalet maintenant et la liste est longue

Cuisiner et recevoir la petite famille tous les mercredis : Yes !! c'est l'fun l'habitude est bien installée

il reste

les gros voyages les MUST: Italie, Écosse-Irlande, Scandinavie, Chili-Pérou-Argentine, Bora-Bora, Nouvelle Zélande, L'Ouest américain, Yukon-Alaska. J'espère qu'on commencera cette année avec RA! RA! RA! (roulement de tambour) RA ! RA! RA! : ITALIA

La bella vita ! Cosi ho prassi italiana in Toscana e mangiare pizza,gelati, e pasta con el mio marito.

Boire que de très bons vins, ( italiens, argentins, australiens, californiens) les déguster et essayer de se rappeller de leur nom ! Tient ça me donne envie d'en ouvrir une tusuite et de déguster pendant que j'écris.


---PAUSE ---


Ecrire un scénario de sit-com, ça se passera dans une bibliothèque publique d'une grande ville du Québec, j'ai des idées qui me viennent chaque jours depuis 25 ans minimum. Ecrire aussi des nouvelles, du rap, du slam, ca garde jeune.

Mieux jardiner, tenter de récolter quelques légumes pour la famille et non plus pour seulement nourir les lièvres, les suisses, les étourneaux et les ratons.

Apprendre à danser correctement la salsa, le tango etc (pour cela j'ai bien peur d'avoir à trouver un nouveau partenaire)

Fréquenter plus assiduement coiffeuse, esthéticienne, podiatre, physiothérapeute, massothérapeute, manicuriste, professeur de yoga, c'est mon corps qui le réclame.

Cuisiner comme Ricardo, DiStasio et les chums de Christian Bégin. Je ne cherche pas à insulter Soeur Berthe et Jéhane Benoit, je leur suis très reconnaissante, c'est avec elles que j'ai appris la base.

Inviter plus régulièrement les joyeux naufragés qui vieillissent eux-aussi. Ah le plaisir de se radoter les mêmes maudites vieilles histoires et faire comme si c'était la première fois qu'on se les contait, ca c'est des chums. D'ailleurs tient donc, il faut se voir bientôt, en mars sans faute.

---PAUSE----


Etre en santé, aimer, s'amuser, apprendre et garder le sens de l'humour quoi qu'il advienne.

Ciao